Bon, le Nil c’est bien sûr l’eau, les champs, la nature, la campagne, mais aussi quelques sacrés vestiges : ben oui, les Egyptiens ne plaisantaient pas avec les vieilles pierres!!! Et adoraient en mettre partout !
Nous avons donc profité également d’arrêts culturels, toujours guidées de Walid, une bibliothèque à lui tout seul !!! (mais comment fait-il pour retenir toutes ces dates ?? Et tous ces dieux, ces pharaons, ces dynasties ??).
Nous avons d’abord accosté au site dit de « Djebel Silsileh », à 45 kilomètres d’Edfou : il s’agit de la carrière de grès la plus importante d’Egypte, qui a servi à la construction des plus grands : Louxor, Karnak, Edfou, Abou Simbel dont on parlera plus tard… et qui apparait accessoirement dans Astérix, les fan se rappelleront la scène !
Il se trouve que les artisans qui travaillaient là et certains pharaons en ont profité pour se tailler quelques jolis petits temples, en mode « cavernes » dans les blocs de granit, que les coptes ont occupés par la suite, et qui donnent donc un visage particulièrement séduisant à la visite de cette carrière… (bon, oui, parce qu’une carrière toute seule, hein…)
Notre arrivée est assez magique : le site se dresse là, devant nous, dans le sable, avec son gardien assis sur les marches, en belle djellaba bleu ciel, et on est tout seuls. Hop, on accroche le bateau, on saute sur les pierres, et nous voilà dans cet endroit hors du temps, des siècles et des siècles plus tôt…
Chapelles, temples, sanctuaires, cénotaphes (tombeaux élevés à la mémoire d’un mort sans en contenir sa dépouille) s’égrènent sur cette rive au sable clair.
On retient particulièrement le temple d’Horemheb, dédié à Amon, Mout, Khonsou, Sobek, Taouret, Thot et accessoirement à lui-même !!
On peut visiter moultes chapelles, dont certaines ont un accès assez ludique, un peu caché dans la pierre façon passage secret à découvrir; des célébrités y ont apposé leur nom: Séthi 1er, Ramses II, Merenptah et Ramsès V dont on a visité les tombeaux, mais aussi Ramses III et Sheshonq 1er -tiens celui-là c’est la première fois que j’entends parler depuis le début du voyage!-.
Le gardien nous suit, et nous taille des petites pierres en forme de coeur, avec un Z sur celui de Zoé, forcément, elle adore…
Lorsqu’on remonte sur le bateau et qu’on longe le site, on continue de voir ces ouvertures dans la pierre qui dominent l’eau, c’est vraiment poétique…
Notre deuxième stop est pour le très célèbre temple de Kom Ombo, dédié à Sobek… le Dieu à la tête de crocodile, si stylé !!!
Walid nous apprend que le temple est ouvert en soirée et qu’on peut y faire une visite de nuit, l’idée me plait beaucoup!
Nous voilà donc débarqués, un peu en retrait des gros bateaux qui s’arrêtent tous sur le quai au pied du temple, collés comme des sardines les uns aux autres : qu’on est bien sur notre petit sandal! Il nous faut marcher une dizaine de minutes dans le noir et la campagne avant de gagner le site, mais Walid juge qu’il y a encore un peu trop de monde, on se pose donc dans un café pour patienter. Thé à la menthe et musiciens nous accompagnent : une fois n’est pas coutume, on est tout seuls à nouveau sur cette jolie terrasse alors que le temple à dix mètres semble très investi.
Vers 19 heures trente, on pénètre sur le site, par une haute volée de marches qui le révèlent, joliment éclairé.
C’est un temple gréco-romain consacré à deux divinités : Sobek donc, le dieu crocodile, dieu de la fertilité, et Horus, dieu-faucon, représenté ici en tant que dieu de la médecine.
On imagine que les pieds du temple étaient à l’époque infestés de crocodiles vu toutes les momies de cet animal trouvées dans des sarcophages à l’entrée, et exposées au musée du crocodile attenant.
Kom Ombo est dessiné de façon parfaitement symétrique, sans allée centrale mais avec deux couloirs.
Le style grec lui donne comme particularité d’être plus précis sur les dessins des corps : ici une fesse, là un nombril, les plis d’un genou, les jolis abdo de ces messieurs, un sein qui dépasse, le fameux culte du corps!
On se réjouit des multiples représentations de Sobek, que l’on voit rarement dans les autres temples, et que je trouve particulièrement esthétique avec ses dents acérées : il pourrait parfaitement être un héros de bande-dessinée de Fantaisy, et s’il avait existé en figurine, je suis sûre que mes garçons auraient adoré l’intégrer dans leurs bataillons de bestioles fantastiques!
Les scènes d’offrandes sont très riches, et parfois gigantesques!
En petits détails, on retiendra le dessin d’une femme qui accouche, en position accroupie, une femme qui donne le sein, et Isis sur sa chaise d’accouchement : forcément, j’y suis sensible !
Mais le temple de Kom Ombo a encore de quoi me toucher : c’était aussi une école de médecine, en atteste la jolie représentation de dizaines d’instruments médicaux! Ventouses, compresses, forceps, stéthoscope, onguents, évidemment sans les explications d’un expert, on passerait à côté…
Les éclairages sont ténébreux et donnent une dimension particulière à la visite malgré le monde encore présent.
On découvre aussi un « nilomètre »: une sorte de puits avec un escalier en colimaçon qui mesure la hauteur de la nappe d’eau créée par le Nil! Nous avions loupé celui qui siège près du quartier copte au Caire, voilà enfin notre curiosité rassasiée! L’anecdote est maligne: Les pharaons avaient décrété que, si le niveau du Nil dépassait 14 bras (soit 7 mètres), alors on était sûr que les récoltes seraient bonnes… et que le peuple pourrait payer l’impôt !!! Le nilomètre était donc aussi un astucieux instrument de mesure qui décidait du moment où les paysans pouvaient passer au tiroir-caisse du royaume ! Inondés d’impôts, finalement !
Le musée du crocodile, inclus dans le prix du ticket, a beaucoup plu à Zoé : dizaines de crocodiles embaumés, momies de crocodile enserrées dans leurs bandelettes antiques, oeufs de croco d’époque, foetus dans l’oeuf, fines statuettes à l’effigie de Sobek, le crocodile était un animal vénéré, autant craint qu’adoré … Parfois on lui faisait porter des bijoux, on le couvrait d'offrandes comme une idole, on lui dédiait des sacrifices, et on l’embaumait au même titre que les membres de la famille !
J’ai eu envie de retourner seule sur le site le lendemain matin, à son ouverture (j’ai créé l’exploit d’être la première à passer les portes, et à me trouver seule quelques minutes au milieu des pierres… et des archéologues déjà présents!), pour l’admirer à la lumière du soleil levant. Balade bucolique le long des champs pour y arriver, passage sous une grille du quartier qui était encore fermée… A cette heure, pas de vendeur de rue pour vous harceler!
J’ai retrouvé les dessins expliqués par Walid, et j’ai pris plaisir à inspecter les petits détails anodins dans la richesse des frises de chaque mur et de chaque pilier : une abeille, un coeur, un scarabée, une petite bête fantastique non définie, quelles sources d’inspiration pour qui aime le graphisme!!! Et quel travail de titan côté taille dans la pierre…
Le Nil a décidément des merveilles de tous types à nous révéler…
PS : bonus pour ceux qui auront eu le courage de lire jusqu'au bout : trouverez-vous dans les photos les gros zizi qui projettent leur semence, gage de fertilité ???
Comments