Vivre l'éclosion du printemps au pays de Cro-Magnon
- chamcamille
- 10 avr.
- 10 min de lecture





On laisse derrière nous notre grosse semaine de boulot, les cartables, et la maison pas rangée…
Tant pis, un week-end prometteur s’annonce dans la Vallée de la Vézère, en Dordogne!!!
On va jouer les VIP dans cette explosion de nature et d’histoire, à la rencontre de Cro-Magnon : merci Voyage Family et Sémitour Périgord pour l’invitation!
Vendredi, 22 heures : dans la nuit noire, une petite route grimpe en serpentant depuis le village des Eyzies dans une forêt de chênes verts. Pour un peu, on verrait bien surgir le Grand Méchant Loup face à nous !!
Mais c’est finalement le chalet du Petit Chaperon Rouge qui se dévoile sous nos phares, accueillis par Agnès, sa propriétaire aux petits soins.
Le Gite de Légal jouxte la Ferme du même nom, où mijotent des confitures alléchantes, dont deux pots nous attendent sur la table de la cuisine: hum !
Spacieux, de plein pied, avec une jolie terrasse qui domine la prairie, une piscine, un trampoline, une balançoire, c’est assurément le paradis des enfants ! Et on est touchés de voir que ce gîte entièrement écologique est labellisé pour l’accueil des familles en situation de handicap : chapeau !!!
Nous sommes arrivés en début de soirée sur le charmant bourg des Eyzies (non, non, on ne prononce pas « des zizis »!), dans la douceur d’une journée de printemps qui s’étire encore un peu.
On nous attendait au restaurant « le Nosco", pour un menu dégustation alléchant : foie gras à la confiture de myrtilles (quelle belle idée!), betteraves chioggia à la crème de chèvre, aux noix et au miel (un régal), puis truite ou confit de canard avec leurs petits légumes de saison… Un restaurant qui met en avant les produits locaux en circuits courts, à la déco chaleureuse, et au service attentionné. Le dessert trouve encore un peu de place, mais les estomacs sont repus!
Juste à côté, une épicerie locale voisine fête sa réouverture pour le printemps: un apéro des voisins s’est improvisé. Ici la population est détendue, très attachée au terroir, ça sent les guêtres et les châles en laine, on revendique le retour à la nature! On ne résiste pas à entrer : des « compotines » originales nous font de l’oeil : pomme-framboise-gingembre, pomme-kiwi-menthe, pomme-poire-verveine citronnelle, pomme-myrtille-gingembre, comment ne pas succomber ?
La soirée tire à sa fin, on est heureux de se coucher, et c’est une journée intense mais prometteuse qui s’ouvre à nous le lendemain !
On a déjà la chance d’avoir approché en vrai et de tout près l’art pariétal des Premiers Hommes dans des sites uniques comme dans le Kakadu National Park dans le Top End Australien ou le massif de Spitzkoppe en Namibie.
Mais parfois l’exotisme se trouve aussi à sa porte, et la Vallée de la Vézère et ses fantastiques sites préhistoriques nous ont bluffés!
On commence par une visite guidée privée de Lascaux IV, en privilégiés .
Emma nous attend pour deux heures de voyage au coeur de l’histoire incroyable de ce site réputé. Un astucieux système de casque avec boitier est remis à chacun pour permettre une immersion totale, bercée par la douce voix de Emma dans nos oreilles, la concentration est donc idéale.
Inscrite au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco depuis 1979, on découvre l’histoire de cette grotte découverte par Marcel Ravidat et son chien Robot, un jour de septembre 1940. A la recherche d’un trésor fantasmé par les légendes du village, le maître et l’animal tombent sur un petit trou dans la colline : ce n’est pas le trésor attendu, mais quel trésor !!!
On grimpe sur les toits du musée, et Emma nous dévoile le paysage vert et printanier qui s’offre à nous. Elle nous demande alors d’imaginer les lieux il y a 20000 ans, à l’ère glacière : tourbes, sols gelés, peu de végétations, un petit film en passant nous plonge dans l’ambiance.
La visite est super bien menée: avant de pénétrer dans la grotte reconstituée, on longe la colline où l’on entend le chien et son maître, premier bond en arrière dans le siècle dernier…
Puis nous voilà projetés il y a 20000 ans, à l’époque magdalénienne.
Emma nous rappelle que Homo sapiens n’est pas l’Homme-singe voûté aux cheveux longs qui grogne et porte une massue sur l’épaule, mais bien un homme debout, bien dressé, à l’intelligence identique à la nôtre : on pose le cadre!
Et l’on en prend la mesure dès qu’on pénètre dans la grotte reconstituée.
Une merveille s’offre à nous : un véritable sanctuaire, des milliers de représentations animales au dessin fin et maîtrisé. Aurochs, rennes, chevaux, en noir, ocres jaunes et rouges, ce sont de véritables artistes de la Préhistoire qui ont oeuvré ici. Emma nous raconte les mystères toujours persistants des peintures, les gravures superposées, les hypothèses de signification, le travail de reconstitution est millimétrique et absolument bluffant… Pendant près de deux heures, nous voilà totalement transportés dans ce voyage au coeur de la Préhistoire, petits et grands restent attentifs et bouche bée, accrochés à la voix de notre guide si passionnante.
On reviendra l’après-midi pour finir notre visite car les espaces immersifs proposés sont vraiment bien imaginés : cinéma à 360°, théâtre d’art pariétal, tablettes interactives, tout est pensé pour rendre la visite très attrayante! Et pour couronner le tout, déambuler dans cette faille architecturale - très réussie avec ses plafonds de verre, ses jeux de lumière striées sur le sol et les parois - est un véritable bonheur pour l’amatrice de belles images que je suis.
On peut le dire, Lascaux IV nous a littéralement conquis: enfants, ados, parents!
Alors que la matinée touche à sa fin, on gagne à pieds le village de Montignac-Lascaux, celui qui a vu grandir le jeune Marcel, où la douceur semble être la même que celle des années 40.
Il fait beau, le ciel est bleu, les oiseaux pépient à coeur joie, les bourgeons explosent, l’herbe est grasse et verte, c’est un printemps éclatant qui exulte pour nous en Dordogne.
On traverse la Vézère et on gagne le tout petit marché du samedi (les locaux nous apprendront qu’il est beaucoup plus conséquent le mercredi) : on goûte une charcuterie alléchante, on fait des provisions de fromage, on achète quelques pommes, du pain, des fraises du pays - les premières du printemps!- et on rejoint le parc du Thot pour le pique-nique, à une dizaine de minutes de route.
Quel bonheur de sillonner la campagne si douce sous ce soleil enchanteur!
Le parc est extrêmement paisible en ce premier week-end d’avril et à cette heure méridionale, on dirait qu’on est tout seuls, quelle paix!
Charlotte nous accueille et nous explique le programme : elle viendra nous initier dans une heure à la taille du silex et à la confection d’un pendentif en stéatite!
On apprécie cette pause repas au soleil, le calme est total… Il y a ici l’enclos aux daims, là bas des aurochs, plus loin des bisons et des chevaux de Przewalski, et les loups rôdent aussi! Visant à montrer au public la faune présente à l’ère préhistorique, le parc est petit mais très adapté aux jeunes enfants.
Mais ce qui a le plus emballé la troupe, c’est évidemment l’atelier animé par Charlotte : on apprend des tas de choses sur le silex, les outils, le vocabulaire, les techniques de taille, et nous voilà partis pour créer notre perçoir! Chacun y met du coeur et réalise que Cro-Magnon était à l’évidence un compagnon plus habile que nous ! Puis on change d’abri et nous voilà en route pour créer notre pendentif en stéatite, à l’aide des outils en silex fabriqués sur l’atelier précédent.
Quelle fierté de porter au final notre création préhistorique autour du cou!
Charlotte est une super animatrice, on aurait bien testé la démonstration du feu ou la fabrication d’une lampe à graisse, mais il est temps de gagner l’enclos des loups, qui sont bien actifs.
Un guide est présent pour renseigner le public sur la population actuelle des loups en Europe, l’organisation de la meute, leurs modes de déplacements. Après de longues minutes d’observation on part en quête des bisons et des chevaux de Przewalski qui sont dans des prés alentours : la campagne chante sous le soleil!
C’est une chasse au trésor en autonomie qui nous attend pour finir la journée. Au départ du village de Peyzac - Le Moustier, les ado téléchargent l’application « Terra Aventura » sur leur téléphone, qui propose des parcours dans toute la France. Nous voilà embarqués dans une déambulation bucolique à travers les ruelles, sur les placettes, dans les hautes herbes, face au majestueux site troglodyte de La Roque St Christophe (qui nous a rappelé celui des Indiens du canyon de Chelly en Californie!).
Le soleil baisse, c’est une explosion de vie autour de nous : les insectes sont libérés, les boutons d’or, les pâquerettes, les pissenlits inondent les prairies, les glycines dégoulinent sur les jolis murets de pierre sèche, l’habitat de la Vallée est élégant, la Dordogne est décidément une si jolie région de France…
On finit par trouver le trésor, lové dans un tronc d’arbre, au pied d’un ruisseau et de son lavoir à l’ancienne, je ne me lasse pas de ce cadre si charmant…
De retour aux Eyzies, on admire la falaise qui domine le village, dorée par les derniers rayons du soleil.
On passe une soirée bien agréable au gîte, il fait si doux qu’on passe le dîner sur la terrasse, Zoé jouit enfin du trampoline… Il va falloir recharger les batteries pour le lendemain!
Le dimanche, nous avons rendez-vous à 10 heures sur le site de la Grotte du Grand Roc et des Abris de Laugerie-Basse, classés eux aussi au patrimoine mondial de l’Unesco.
Nous sommes chaleureusement accueillis par Benjamin, encore un guide passionné!
On grimpe d’abord vers la Grotte du Grand Roc, découverte en 1912 par Jean Maury, natif de Peyzac-le Moustier (le village de la chasse au trésor!), devenu un célèbre spéléologue et préhistorien installé aux Eyzies.
On domine tout le paysage et la Vézère en contrebas. C’est le printemps aussi pour les oiseaux, qui reviennent dans leurs habitats : choucas, faucon pèlerin et premières hirondelles des falaises nous font le spectacle !
On plonge au coeur des merveilles de cette grotte, où le temps et l’eau ont façonné sur des milliers d’année une dentelle de calcite fascinante.. Un centimètre par siècle, ici aussi on mesure le vertige du temps qui passe…
On jouit encore d’une visite en exclusivité, on est vraiment chouchoutés, et on peut poser toutes nos questions sans complexe!
La grotte du Grand Roc, c’est une visite aussi intéressante d’un point de vue géologique qu’amusante pour les formes qu’on devine dans ces sculptures naturelles.
En allant vers les abris préhistoriques de Laugerie-Basse, on rencontre la famille Jugy qui tient le restaurant local, ils vivent ici, sous la falaise, de génération en génération depuis le XIXe siècle, et les anciens ont bien connu le découvreur Jean Maury. Le restaurant est fermé pour le dernier dimanche de repos avant la reprise d’une saison où ils seront ouverts en continu. Ça sent bon la soupe en train de mijoter sous la cuillère de la grand-mère, pour l’ouverture du lendemain: un endroit qui sent bon l’authenticité et où il serait bien tentant de revenir un jour!
La visite des abris commence par un film en 3D franchement génial : je suis impressionnée par tout ce que ces petites structures d’allure familiale ont déployé comme ingéniosité pour parfaire la curiosité du public.
Puis Benjamin nous montre des reproductions des objets retrouvés dans les Abris: les originaux sont éparpillés dans les plus beaux musées du monde, comme le Musée de L’Homme à Paris, et l’on prend la mesure de la variété artisanale de cette époque préhistorique du Magdalénien, marquée par l’apparition des objets d’arts ou du quotidien gravés ou sculptés avec une finesse déjà impressionnante.
Les abris en eux-même sont creusés par l’érosion dans la falaise: ils inspirent le recueillement, car imaginer que l’on foule des milliers et milliers d’années d’occupation à l’ère glacière où l’on chassait le renne semble un peu fou.
On inspecte les strates millénaires du sol, les trous dans la falaise (pour les poutres des habitats troglodytes du Moyen Age), des scènes de vie sont reconstituées, des écrans tactiles interactifs super bien faits ont été installés pour les plus jeunes, et Benjamin continue de nous transmettre son admiration et sa passion pour Cro-Magnon!
On finit par un cours de lancer de sagaie au propulseur, très apprécié des enfants, qui donnerait bien envie d’inscrire l’activité aux Jeux Olympiques !!!
Pour le déjeuner, nous sommes attendus au Roc Breizh, un restaurant dans les Eyzies, dont la gérante est adorable! On est accueillis comme des rois, notre table est dressée, l’ambiance est décontractée et le menu mêle des spécialités périgourdines et bretonnes qui « matchent » étonnamment bien. Nos ados se sont régalés avec des burgers périgourdins ! Et les crêpes restent une valeur sûre, surtout quand elles sont assaisonnées de bons produits locaux…
Il est maintenant temps de rejoindre notre dernière étape avant la fin de ce week-end exceptionnel en Dordogne: les bords de la Vézère, pour une rando-vélo de 36 kilomètres en aller-retour des Eyzies au très joli village de Limeuil, sur une voie verte aménagée entre la rivière et les champs, au coeur des terres de Cro-Magnon.
Les températures ont continué de monter, on vit un délicieux 25 degrés en ce premier dimanche d’avril, et pédaler sur le chemin tout plat de la voie verte entre les ânes, les vaches, les prairies et les quelques jolies maisons de pierre est un pur plaisir.
Totalement accessible aux familles car bien sécurisé sur une voie dédiée, ce parcours longe la Vézère et permet de se poser dans l’herbe ou de faire demi-tour quand on le souhaite.
Mais on est des warriors, et on a décidé d’aller jusqu’au village de Limeuil, à 18 kilomètres des Eyzies, dont plusieurs locaux croisés pendant le week-end nous ont vanté le charme.
On traverse entretemps la bourgade du Bugue, qui semble aussi proposer plein de recoins pour profiter de la Vézère, et c’est bien transpirants qu’on passe l’arche du pont de Limeuil.
Posé à la confluence de la Vézère et de la Dordogne, ce village classé parmi les plus beaux de France est un ancien port de batellerie dans lequel il est sacrément bon de se poser pour étancher sa soif !
Avant de s’asseoir à l’ombre d’un parasol sur la terrasse qui borde l’eau, on poursuit un peu l’effort pour grimper dans les ruelles escarpées du village, où façades en pierre, toits aux toits de tuiles brunes typiques du Périgord noir et petites courettes intérieures rivalisent de charme, magnifiées par l’explosion des couleurs du printemps.
C’est vraiment croquignolet!
La grenadine fait un bien fou, Zoé a droit à sa traditionnelle glace de la récompense, et nous voilà repartis en sens inverse.
Les cuisses chauffent de plus en plus au soleil descendant, les lumières subliment les prairies, un petit vent de face est monté et nous demande un peu plus d’effort, on repasse devant le panneau de la Grotte du Sorcier qui titille ma curiosité, mais voilà enfin les falaises des Eyzies dont on ne se lasse pas!
Dernières poses photos au bord de la Vézère, il est temps de regagner Toulouse.
On peut dire qu’on a passé un week-end exceptionnellement riche d’expériences, sacrément gâtés entre nature et culture préhistorique : vive le printemps au pays de Cro-Magnon !
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