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Se perdre encore et encore sur l'île Eléphantine, dans ses ruelles et dans la culture nubienne!







Vivre deux jours sur Eléphantine, c’est plonger dans la culture nubienne.

Les visages sont de peau plus foncée, burinés par le soleil.

Les Nubiens sont un peuple à part, avec leurs coutumes, leurs traditions, leur histoire.


La Nubie faisait partie intégrante de l’Egypte à la période antique, terre de richesses -ses mines d’or!-, chemin de passage entre l’Afrique et la Méditerranée.

Divisée en Basse-Nubie (de la première à la deuxième cataracte du Nil), encore appelée « pays de Ouaouat » (pays de l’or), et la Haute-Nubie (à partir de la deuxième cataracte), ou « pays de Kouch », on y vivait paisiblement en villages le long du Nil, jusqu’à ce que les travaux pour maîtriser les crues du Nil viennent tout chambouler. La construction du premier barrage d’Assouan en 1902 submergea des habitations entières, obligeant les villageois à reconstruire plus en hauteur.

Mais le projet du grand barrage des années 60 ne permit plus d’envisager cette solution, le niveau de l’eau allait devenir trop haut, des milliers de Nubiens furent contraints à l’exode, vers Assouan, le Caire, Alexandrie, et parfois même vers l’Europe…

C’est une grande souffrance qui fut imposée là aux terres qui ont nourri de leur or pendant des milliers d’années les plus grands temples pharaoniques du pays…


Cet arrachement à leurs ancêtres est encore très ancré dans l’esprit nubien, et nous avons pu visiter un petit musée privé très artisanal sur Eléphantine, dont la visite est guidée - dans un français un peu automatisé mais compréhensible - par l’épouse du propriétaire.

C’est vendredi, la porte est fermée. Je discute avec un habitant assis dans la rue pour savoir si le musée va ouvrir, et l’épouse du propriétaire nous entend, du haut de sa fenêtre au 1er étage. Elle vient nous ouvrir de son pas nonchalant et nous guide dans la cour de la maison où les objets nubiens d’autrefois sont exposés, un peu négligemment. Elle nous apprend la culture nubienne, les dessins naïfs sur les murs destinés à protéger le foyer, les petites niches triangulaires dans les hauteurs des parois pour permettre aux mauvais esprits de s’échapper et laisser ainsi la vie sauve aux nouveaux-nés;  la vie centrée autour du Nil et du palmier-dattier qui sert à tout, depuis les troncs pour la construction des poutres pour les toits, les bancs, les ponts sur les canaux d’irrigation jusqu’aux fibres des palmes pour tresser les paniers, les assiettes, les baudriers pour monter chercher les dattes, en passant par les tiges solides dont on fait des balais -nous l’avons vu dans un village au cours de la croisière-, des berceaux, des sommiers, des étagères.

Elle nous explique la faune du lac Nasser et du désert nubien : crocodiles, chacals, scorpions, cobras, scarabée royal, et toutes ces magnifiques espèces d’oiseaux dont la population se renforce en hiver avec les migrations venues de l’Europe, et les poissons du lac (poisson-chat, poisson ballon toxique, perche du Nil..), dans une pièce qui regorge de ces spécimens empaillés!

Nous avons aussi droit à un petit exposé de géologie, la Nubie ne manquant pas de pierres précieuses, Mohamed Sobhy - le propriétaire à l’initiative de ce petit musée privé- ayant patiemment collecté les pierres de sa région.

Un petit moment très instructif au coeur d’une maison nubienne dont les propriétaires ont à coeur de transmettre leur culture aux générations actuelles, afin que ces traditions millénaires ne finissent pas englouties sous les eaux, elles aussi…


Eléphantine possède aussi des vestiges archéologiques à son extrémité sud : après la splendeur de tous les temples visités, ce site qui semble un peu abandonné fait pâle figure, mais une annexe regroupe quelques très jolies figurines miniatures retrouvées sur place, dans des tons turquoises superbes. On y jouit surtout d’un très beau panorama sur le Nil.


On se souviendra longtemps de notre expédition nocturne le dernier soir pour trouver un endroit où retirer de l’argent : une machine ATM apparait sur mon plan Google dans l’hôtel Mövenpick à l’extrémité nord de l’île (absolument affreux, heureusement il n’est pas visible depuis notre quartier!). Nous voilà à suivre le GPS du téléphone, dans le noir, à emprunter les ruelles sombres, tantôt obscures, tantôt éclairées d’un faible néon orangé, tantôt vides, tantôt occupées des murmures des voisins, et nous voilà perdues : Google voit des chemins où nous trouvons des murs, les habitants tentent de nous guider, « c’est facile, tout droit, puis à droite! ». Mais inexorablement, à droite, c’est un mur qui s’élève, une impasse, un cul de sac. 

La labyrinthe nocturne devient oppressant, je ne suis même plus sûre de parvenir à revenir sur nos pas, j’ai l’impression de participer à un jeu de rôle angoissant!

Finalement un jeune Egyptien nous indique un chemin qui oblige à passer sur la jetée, au bord de l’eau, à sauter, à enjamber les débris de ciment, et nous voilà dans les immenses jardins de l’hôtel!

L’épopée infernale se poursuit dans l’établissement où aucune sortie n’est possible, on comprend qu’on ne peut venir ici qu’en bateau depuis la ville! Alors nous retrouvons le chemin chaotique de l’aller, et nous sortons du labyrinthe en retrouvant les ruelles - non moins labyrinthiques mais familières! - qui nous mènent à notre chambre, et au restaurant du Nile View, un petit établissement voisin où nous avions délicieusement mangé le midi !

Zoé m’épate, aucun stress chez elle, elle me suit sans jamais s’inquiéter, et trouve toujours à caresser un chat qui croise notre chemin!

On passe notre soirée seules (décidément!) au bord de l’eau, dans le vent du Nil pour nos dernières heures sur Eléphantine et en Egypte.

Se perdre sur cette île, c’est vivre pleinement à la Nubienne!





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