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Madagascar : un doux dimanche à Tana



Après nos vingt-quatre heures de déboires aériens, qui mériteraient un post à eux seuls, nous avions grandement besoin, Zoé et moi, de nous ressourcer en attendant l'arrivée de la team masculine atterrissant dans la soirée. J'ai enfin pu savourer les sensations de mon retour à Tana, la capitale de Madagascar, au coeur d'un écrin de douceur : la chambre d'hôtes Mandrasoa. Après un réveil précoce et un petit déjeuner encore marqué du stress du départ des garçons, le temps de l'apaisement arrive enfin et le jardin de nos hôtes est parfait pour ça ! Une maison au style suranné comme je les aime, avec son parquet qui craque et qui sent bon la cire d'abeille, sa terrasse ensoleillée et verdoyante, sa piscine (un peu froide!) qui déborde sur les toits de la ville, ses dames de service au sourire enchanteur, et son prix si doux lui aussi ! Dix ans après, je retrouve avec bonheur le tumulte de la ville, le bourdonnement de la circulation, les couleurs des étals de fruits et légumes qui jonchent le sol, les pépiements des milliers d'oiseaux, les flamboyants quand on lève la tête, et l'on se sent aussitôt réfugiés dans une bulle de calme dès qu'on a fini de gravir les escaliers qui mènent à la maison. En bas, les malgaches commercent langoureusement dans la chaleur du dimanche matin; en haut, on se fait bercer par le temps qui passe.

Zoé est aux anges : crêpes au petit déjeuner pour accompagner le chocolat chaud, piscine (très!) rafraîchissante, jeux de Barbie interminables dans la pelouse. Richard, notre contact malgache sur place, avec lequel j'avais dessiné notre circuit il y a 10 ans, vient passer un petit moment avec nous, on n'en revient pas d'avoir réussi à se retrouver de nouveau pour cette nouvelle aventure du Nord de Madagascar! Puis on se lance à l'assaut du marché en fin de matinée, qui débute juste au pied des escaliers, pour aller en quête de sous-vêtements oubliés à Toulouse (la précipitation des derniers préparatifs!) : c'est impressionnant, j'ai l'habitude de ces étendues intimidantes, où les odeurs des corps se mêlent aux odeurs des plats, où la population se dévoile dans toute son authenticité, mais pour une fois nous sommes seules sans homme à nos côtés, j'ai de l'argent liquide dans le sac à dos, et je ne suis pas très à l'aise de me livrer ici, un peu fragile. Le tour est donc rapide, mais les étalages multicolores de fruits et légumes me font déjà saliver!

La journée passe tranquillement, sieste, baignade, lecture, puis je me décide à sortir de l'écrin. J'ai repéré le musée de la photographie, qui n'existait pas il y a 10 ans, et qui me semble l'endroit parfait pour terminer ce dimanche dans Tana.

Au pied de l'escalier, on monte dans un taxi : le délice de retrouver ces carcasses toujours aussi pourries, dont on ne comprend pas comment elles parviennent encore à rouler dans les rues tortueuses et grimpantes de la ville! Le monsieur démarre en faisant toucher les fils (oh que j'adore!), la carlingue couine dans tous les sens, on manque de caler à chaque passage de rapport de vitesse, mais on grimpe, on tourne, on grimpe et on tourne encore, jusqu'au Palais de la Reine, et je retrouve avec plaisir cette architecture en pente de la ville, qui me fait penser, dans de plus humbles dimensions, à la ville de la Paz, et qui explique pourquoi, en plus de l'Afrique et de l'Asie, je ressens aussi un peu d'Amérique du Sud dans ce Madagascar si attachant.

Le Musée de la Photographie est un bel endroit, plein de charme, qui domine la ville, cerné par un petit jardin tropical, et qui retrace l'histoire du pays, ses villes, ses bâtiments, ses transports, sa pharmacopée, ses traditions, sublimés par le noir et blanc des photos d'époque. L'exposition temporaire raconte l'histoire du lamba, cette grande étole de coton dont s'enveloppaient jusqu'aux années 1970 le peuple malgache, quel que soit son niveau social, économique ou d'éducation. Ce vêtement est le symbole ultime de la dignité humaine de la population du pays. La friperie viendra écraser cette tradition vestimentaire, mais le lamba enveloppe encore les nouveaux-nés à leur arrivée, et sert de linceul aux morts pour les accompagner vers les ancêtres (les cérémonies des retournements des morts sont encore très pratiquées dans certaines régions du pays). C'est le signe de "la tête haute", et chacun, miteux ou étincelant, se doit de porter ce symbole malgache fort. Le ciel se couvre avant le coucher du soleil, l'orage arrive. Voilà un bien doux dimanche à Tana!










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