La houle a été marquée cette nuit, et vers 4h, Arthur a levé l’ancre pour Bora. Cinq heures de navigation avec beaucoup de vent, une porte claque sans cesse dans notre cabine, je suis bien allongée mais pas capable de me lever plusieurs fois alors je finis la nuit dans un demi-sommeil. Une paupière s’ouvre, le ciel s’enflamme derrière le hublot, Pierre se lève pour assister au lever de soleil, je reste engourdie.
Vers 7h30, je sors de la cabine, nous sommes toujours en navigation, les voiles sont dehors, le vent nous pousse bien.
Je suis épatée de voir à quel point l’organisme s’habitue au roulis car d’après Arthur, la houle a été plus forte que sur la première traversée! La lune était pleine et c’était manifestement un boulevard pour naviguer de nuit.
Une fois la passe de Bora Bora passée, on admire son relief, avec son sommet central, et l’eau partout autour.
On s’amarre à une bouée près du motu Fanfan, dans un dégradé de bleus encore une fois extraordinaires : du turquoise plein les mirettes, on va être bien ici aussi!
Des sternes nous survolent, le turquoise de l’eau se reflète sous leurs ailes, on a vraiment l’impression qu’elles sont bleues, c’est épatant!
D’après Marie et Arthur, ils n’ont pas souvent vu le lagon de Bora aussi vide, ce qui bien sûr nous plait à tous! J’avais lu qu'il était couvert d’hôtels, et d’activités touristiques, mais comme tout le monde, j’avais aussi lu que ce lagon était extraordinaire et qu’il ne fallait pour autant pas le rayer de sa liste. Il se trouve que les hôtels semblent vides aujourd’hui et que pour notre plus grand bonheur, il y a très peu de bateaux autour de nous! Le privilège est décuplé et Bora Bora va nous faire vivre une immense émotion sous l’eau….
Arthur nous emmène en fin de matinée en annexe dans une zone du lagon, avec un bon courant, pour nous y faire découvrir de nouvelles merveilles.
On se jette tous à l’eau, il tient l’annexe « en laisse » en faisant de l’apnée, pour que nous nagions en le suivant et en étant visibles d’éventuelles autres embarcations, et nous voilà la tête sous l’eau. Un requin pointe noire de bonne taille est juste en dessous, ça commence bien !
Mais voilà que survient un spectacle à la beauté inégalable : un escadron de raies aigles, encore appelées raies léopards, arrive avec grâce dans le grand bleu. Elles sont plus d’une dizaine d’individus, et volent ensemble au-dessus du sable dans un lent mouvement absolument sublime. On dirait des oies sauvages qu’on aurait filmées au ralenti! La grâce suprême, voilà le mot qui illustre le mieux les images qui défilent sous nos yeux. Elles se laissent suivre très tranquillement, dans un apaisement total, j’ai les larmes qui montent dans le masque tellement je suis émue de ce qui m’est donné de voir.
Les enfants sont subjugués aussi évidemment, et on les suit ainsi sur des dizaines et des dizaines de mètres, avec de temps en temps un requin qui s’invite dans le champ visuel. Harmonie totale.
Zoé se sent pousser des ailes elle aussi et nous fait des plongeons vers le fond avec son masque et son tuba, elle m’épate! On voudrait pouvoir monter sur les ailes de ces magnifiques poissons, aux allures de créatures fantastiques, et se laisser aller à l’ivresse des profondeurs.
On remonte sur l’annexe et on revient au point de départ pour recommencer, il est impossible de quitter pareil spectacle : il nous faut quelques minutes à peine et les voilà retrouvées. L’escadron s’est séparé en deux groupes, qui se réunifient par moment, et de temps en temps un individu se lance dans un solo sur la scène du grand bleu. Les ombres sur le sable magnifient encore les mouvements de battement de nageoires, véritables ailes d’aigles noirs…
En surface, l’eau du lagon est cristalline, on se réchauffe sur les boudins de l’annexe, car si l’eau est très bonne, le vent qui continue de souffler nous refroidit rapidement : on rêve d’une douche chaude, et c’est finalement en retournant dans l’eau qu’on se réchauffe le mieux. On ne peut pas oublier un tel ballet, les élégantes de Bora Bora nous ont ensorcelés...
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