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Heiva i Maupiti (Heiva à Maupiti) : au coeur des Polynésiens






Nous  avons encore de la chance, nous tombons sur une semaine intense de Heiva à Maupiti, ce festival traditionnel qui se tient dans toute la Polynésie en juillet.

Après deux soirées entières passées au Heiva de Huahine, nous allons découvrir les chants et les danses de Maupiti. Et ici, tout est gratuit ! 


Le premier soir Emeraude nous emmène dans son pick up de la 2e guerre mondiale ! On s’installe autour de la piste de sable dédiée au spectacle, et on comprend vite que tous les habitants de l’île se sont donnés rendez-vous pour ce moment tellement important dans l’année. Comme à Huahine, des « baraques » en palmes tressées, construites chaque année pour juillet, et détruites après le Nouvel An, accueillent des jeux forains et des snacks, au menu c’est poisson-cru-lait-de-coco/frites! 

Les spectateurs se sont mis sur leur 31 : ils sont très nombreux à porter des couronnes végétales magnifiques, hommes comme femmes, et tous ont au moins une petite fleur à l’oreille.


La soirée commence par les remerciements en tahitien des différents comités d’organisation, puis comme à Huahine et comme dans chaque soirée de Heiva j’imagine, par une (très) longue prière, en tahitien également, qui insiste sur l’importance de la terre (fenua), la nature, la mer dans la vie des Polynésiens. Je vais garder longtemps en tête le rythme de cette véritable litanie qui est la même partout, lancinante, insistante, lourde, pesante, comme pour ancrer les Polynésiens dans leur culture si forte.

Trois districts sont en compétition, et ce soir c’est chant et danse.

Les costumes sont superbes, Moemoea nous a expliqué que chaque participant doit faire son propre costume, et les costumes végétaux ne peuvent être confectionnés que le matin-même pour ne pas faner avant le spectacle. Quel savoir-faire, c’est assez bluffant.


Les chants sont très longs (une dizaine de minutes par chant), très répétitifs eux-aussi, mais totalement planants, on n’ est pas loin de les voir atteindre une forme de transe ! L’énergie que les chanteurs, avec les différents choeurs, mettent dans ces mélodies est impressionnante.

Les danses sont plus ludiques, et les danseurs se font encourager par leurs supporters, y a de l’ambiance ! On finit par cerner les codes, les mouvements chez les femmes, chez les hommes, déhanchés langoureux, secousses de bassin, jeux de genoux, mouvements de bras : si la moyenne d’âge est plus jeune et le niveau plus amateur qu’à Huahine, les chorégraphies nous semblent plus recherchées.

La soirée se termine en de multiples remerciements (les Mauruuru interminables eux-aussi!), et la commune a organisé le retour des habitants et des touristes en « truck ». gratuit lui aussi. Juste génial. C’est le bus scolaire, tout en bois, façon bus américain en Louisiane des années 50. Tous montent et s’installent sur les banquettes en bois dans un joyeux bazar : les mamies, les enfants, les hommes encouronnés de feuilles, et les gâteaux dans les mains. Ce petit trajet et tous ses stop successifs sont encore une sacrée expérience au coeur des Polynésiens, moi j’adore ! Mauruuru et bonne soirée tout le monde, Nana!!


Le deuxième soir est un final : c’est le concours du meilleur danseur, de la meilleure danseuse, du meilleur couple, du meilleur orchestre puis la remise de prix finale des derniers jours de compétition. 

La piste est superbement décorée, le public est magnifiquement couronné, on perçoit l’enjeu.


Je m’attendris des RaeRae dont je n’ai pas encore parlé dans ce voyage.

Les RaeRae sont des hommes qui se considèrent comme des femmes et se comportent comme telles. On fait une distinction entre Mahu et Raerae.

Être Mahu a une signification culturelle, reconnue dans l’histoire de la société polynésienne, et n’est pas le synonyme d’une condition médicale. Être RaeRae, c’est pousser la transformation jusqu’à l’éventuelle hormonothérapie et la chirurgie. Nous croisons tous les jours dans le quotidien ces personnes RaeRae, particulièrement gracieuses et très naturellement intégrées dans cette société polynésienne. Cela me rappelle forcément ce que nous avons vu aux Philippines, et je suis toujours touchée de voir qu’ici, se transformer selon l’identité sexuelle que l’on vit profondément au fond de soi n’est pas un problème social apparent. Comment expliquer que cela soit aussi douloureux dans nos horizons occidentaux ? On soulève ici à nouveau des sujets de société et d’anthropologie que je trouve passionnants.


Dans le comité organisationnel, plusieurs RaeRae sont présentes et particulièrement élégantes, je suis en admiration de ces reines de la fête!


L’ambiance est à son comble: ça applaudit, ça crie dans tous les sens pour encourager son favori, ça siffle, ça rit. 


Le concours d’orchestre est juste épatant : les percussions se déchainent comme jamais, c’est totalement incroyable de niveau, on s’est même dit avec Pierre que Matthieu Chedid pourrait largement venir chercher ici de quoi accompagner ses talentueux solo de guitare !!!


Et pour finir ces magnifiques soirées de Heiva, on assiste ce soir aux remises de prix : un rituel dans le rituel, autant fascinant qu’interminable !!! Imaginez que comme il y a trois districts, il y a à chaque fois trois prix : 3e, 2e, 1e. Mais on découvre qu’il y a des tas et des tas de prix à remettre !!! Prix de la plus jolie baraque, prix du meilleur poisson-cru, de la meilleure couturière, des meilleurs costumes, des meilleurs mouvements dans chaque type de danses, etc etc…

A chaque annonce de prix, en tahitien donc non compréhensible pour nous, une remise d’enveloppe, des bises, et trente secondes d’orchestre de percussion où tous les enfants du public viennent, déchainés, pour danser en imitant les grands (j’ai d’ailleurs repéré quelques petits bouts déjà très doués!). On a cru que ça ne finirait jamais !! Même le maire a poussé la danse!


La patience des Polynésiens mérite un prix aussi, c’est sûr : début du spectacle, prières, discours, installation des musiciens, changements des danseurs, attente dans le truck que le chauffeur arrive, tout est très lent, mais jamais un problème!


Voilà. Avec toutes ces soirées de Heiva, auxquelles on a eu tant de chance de participer, sur ces petites îles si authentiques, on a vécu au coeur de la Polynésie, on est entrés dans le coeur des Polynésiens!





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